Vous arrive-t-il de ruminer et de penser sans arrêt à quelque chose qui vous cause du tracas ou qui vous angoisse?
Vous ne savez pas comment vous débarrasser de certaines pensées négatives que vous avez?
Aimeriez-vous mieux comprendre ce qu’est la rumination mentale et obtenir des pistes de solutions pour la traiter?
Dans cet article, je vous explique en quoi consiste la rumination mentale et quels traitements sont efficaces.
En quoi consiste la rumination mentale?
La rumination mentale est le fait de penser de façon répétée à quelque chose, quoi que cela puisse être, comme un événement passé par exemple.
Il s’agit d’une habitude mentale qui implique souvent de l’inquiétude, de la peur, du ressassement, du ressentiment et de la contrariété.
On la définit comme une vulnérabilité cognitive, et elle peut jouer un rôle dans la dépression.
À la page 70 de son livre Les États d'âme, l’auteur Christophe André présente un tableau très éclairant qui souligne la dimension essentiellement émotionnelle et non constructive de la rumination, qu’il fait ressortir en la comparant à la réflexion, à base rationnelle:
Rumination | Réflexion |
---|---|
Recherche des fautes, des erreurs, des coupables... «Qui doit être critiqué ou puni?» | Recherche des solutions... « Comment faire maintenant? » |
En général, tendance à amplifier le problème. | Tendance à relativiser, à donner au problème son importance, sans en rajouter. |
Tendance à juger. | Tentative de comprendre. |
Simplifications abusives: par exemple: «Tout vient d'une seule cause. » | Prise en compte de la complexité (sans s’y noyer): il y a en général plusieurs causes à un problème. |
Plutôt tournée vers le constat, le «pourquoi?». | Plutôt tournée vers le futur, le «comment faire?». |
Pas de but précis (d'où enlisement). | Le but est de résoudre le problème ou de s'en désengager. |
Tendance à aborder les situations de manière générale et globale (Malheur, malheur! Un gros problème!»). | Tentative pour aborder les situations de manière précise et pas à pas («Comment fragmenter mon gros souci en une succession de petits problèmes?»). |
Centrée sur le problème («Quelle catastrophe, quel malheur, quelle erreur, quel gâchis...»). | Centrée sur la solution la réparation, la prévention («Que faire et comment réparer?»). |
Ainsi, la rumination, plutôt que nous faire sortir des difficultés, nous entretien plutôt en leur cœur.
C’est pourquoi elle peut être caractéristique d’un état dépressif et du maintien de celui-ci, mais pas nécessairement non plus, comme nous allons le voir.
Il existe plusieurs contextes à travers lesquels une personne vivra de la rumination mentale et cherchera à la traiter.
En voici quelques-uns.
Contexte de rumination 1: Lorsque vous vous sentez lésé(e)
Vous êtes dans une relation amicale ou amoureuse et vous sentez qu’on vous a porté préjudice ou qu’on vous a manqué de respect?
Vous vous mettez à ruminer l’échange verbal qui a eu lieu, vous repensez à ce que vous auriez pu dire ou faire différemment, ou à la manière dont vous auriez pu éviter le conflit ou faire tourner la situation à votre avantage.
La rumination mentale touche ainsi de nombreuses situations sociales et, dans ce contexte, elle est souvent tournée vers les événements passés.
Contexte de rumination 2: Si vous vivez un état dépressif
Lorsqu’une personne vit une dépression, son état est entretenu par un certain type de pensées négatives qui se nomment «distorsions cognitives».
Si vous en souffrez, ces pensées vous portent à ruminer vos malheurs, à penser à tout ce qui va mal dans votre vie et à projeter cela dans l’avenir, ce qui est une source de désespoir.
Les distorsions cognitives vous portent à vous apitoyer sur votre sort.
Vous ruminez ces pensées négatives, et elles entretiennent votre état dépressif.
Cette rumination mentale vous empêche d’avancer et d’entrevoir des solutions pour améliorer les choses.
Cela a pour effet d’augmenter votre sentiment de mal-être et de diminuer votre confiance et votre estime de soi.
Contexte de rumination 3: Lorsque vous vous sentez coupable d’avoir mal agi
Vous sentez que vous avez fait une erreur ou manqué de respect à quelqu’un, vous désirez vous faire pardonner ou corriger une situation passée?
La culpabilité vous porte à penser sans arrêt à la manière dont les choses se sont déroulées et à la manière dont elles auraient dû se passer.
Vous élaborez sans cesse mentalement des scénarios pour changer les événements.
Vos pensées commencent par «j’aurais pu», «j’aurais dû» ou «il faudrait que».
Ce contexte est donc très favorable à la rumination mentale.
Contexte de rumination 4: Lorsque vous souffrez d’un trouble obsessionnel-compulsif
La rumination mentale, qui consiste à ressasser une ou plusieurs pensées encore et encore, peut aussi être un symptôme du trouble obsessionnel-compulsif (TOC): les obsessions.
Ces pensées intrusives vous tracassent et vous causent de l’anxiété.
Le TOC est un trouble qui se manifeste de différentes manières, mais il se divise en deux grandes composantes:
- Les obsessions, qui sont les peurs, les doutes, les pensées et les inquiétudes qui reviennent sans cesse;
- Et les compulsions, qui sont les réactions aux obsessions.
Le but des compulsions est de faire diminuer l’anxiété ressentie et d’éradiquer les obsessions.
Lorsque vous souffrez de TOC, vous accordez beaucoup d’attention à ces pensées parasites, car vous les trouvez dérangeantes, désagréables, et même parfois horribles et insupportables.
Plus vous tentez d’éliminer ces pensées de votre esprit et plus elles collent et reviennent, ce qui les «transforme» en obsessions.
Sans le vouloir, vous tombez ainsi dans le piège du TOC qui consiste à accorder de l’attention à ces pensées et à y réagir.
Il s’agit donc d’une grande source de rumination mentale puisque les obsessions reviennent sans cesse et que certains types de compulsions consistent à les analyser, à se rassurer, etc., ce qui ressasse ces pensées encore davantage.
Cela vient du fait que votre cerveau considère les obsessions comme un problème, et même comme un danger, ce qui a pour effet de les faire «coller» à votre esprit et de les faire revenir de plus en plus souvent.
Les obsessions (et certaines compulsions mentales qui les accompagnent) constituent donc une forme de rumination très dérangeante et difficile à vivre.
Il existe plusieurs types de TOC, dont voici plusieurs exemples:
- La phobie d’impulsion (la peur de perdre la tête et la peur de se faire du mal ou de faire du mal aux autres);
- Le TOC du couple (la peur de ne pas aimer son partenaire en se répétant sans cesse «Je ne l'aime plus»);
- Le TOC de la peur d’être homosexuel;
- Le TOC de propreté (la peur de la contamination).
- L'hypocondrie (la peur des maladies);
- La jalousie obsessionnelle;
- La dysmorphophobie (peur des défauts et des imperfections physiques);
- Etc.
Témoignage d’une personne qui souffre de rumination mentale
Pour illustrer ce que vit une personne qui rumine sans cesse à travers le TOC, voici le témoignage d’un homme qui constate combien le fait de ruminer nuit à sa qualité de vie:
«Depuis 2 ans, je m’imagine sans arrêt que je suis sur le point de mourir.
Je rumine cette même pensée à toute heure du jour, sans réussir à m’en débarrasser.
À un tel point que j’en rêve la nuit, trop souvent.
Cela m’obsède tellement que j’ai fait des recherches sur Internet pour mieux comprendre.
Je me sens constamment stressé, sur le qui-vive, comme si ma vie allait m’être enlevée à n’importe quel instant.
Je pense aux différentes façons dont je pourrais mourir: arrêt respiratoire, cancer généralisé, accident de voiture, poignardé, etc.
Ces pensées récurrentes ne me laissent jamais en paix, surtout la nuit.
Je dois maintenant prendre des somnifères, et je pense sérieusement à consulter un psychologue, surtout parce que ma conjointe se rend compte que je ne vais pas bien…»
Les conséquences de la rumination: comment elle peut affecter différentes sphères de votre vie
Le fait de ruminer des pensées a de nombreuses conséquences pour la personne aux prises avec ce problème et pour son entourage.
La rumination augmente les états mentaux négatifs, ce qui peut favoriser les troubles de l’humeur prolongés, la tristesse, l’impatience, la morosité, voire la dépression.
Quand vous ruminez des pensées, vous créez en vous une zone de vulnérabilité propice à l’éclosion de divers problèmes psychologiques.
Par exemple, le fait de ruminer des événements passés ou futurs et de s’autodénigrer est caractéristique des distorsions cognitives, des pensées qui favorisent le manque de confiance, d’estime de soi, et les états dépressifs.
Voici un exemple de distorsion d’autodénigrement: «De toute façon, je ne réussirai jamais à faire quelque chose de bien de ma vie».
Une autre conséquence de la rumination mentale est la difficulté à concevoir des solutions aux problèmes auxquels vous devez faire face.
Par exemple, vous vous mettez à voir tout en noir, vous sentez que vous vous enfoncez, qu’il n’y a pas d’amélioration possible.
Vous ne savez plus quoi faire.
Si vous souffrez de TOC, la rumination augmente votre niveau d’anxiété et de stress, et exacerbe vos peurs.
Vous devenez plus nerveux, plus irritable, surtout face aux situations stressantes.
Vous réagissez plus fortement dans certaines circonstances.
Cela dit, le fait d’énumérer les conséquences possibles de la rumination n’a pas pour but de vous faire peur, de vous démotiver ou d’augmenter votre niveau d’anxiété.
Alors ne vous en faites pas.
Peu importe le motif de votre tendance à ruminer, des solutions existent, et elles sont à votre portée.
Je vous présente d’ailleurs dans le reste de cet article des pistes de traitement efficaces à la rumination mentale.
Quels traitements vous aideront à cesser de ruminer vos pensées
Si vous avez une tendance à la rumination, vous vous demandez sans doute souvent «comment arrêter de penser (à ce qui vous tourmente)».
Mais il est très important de tenir compte du contexte car, comme nous l’avons vu, ce problème peut être dû à différentes causes.
Les stratégies pour la traiter diffèrent selon la cause dont il s’agit.
Si votre rumination est due à des causes du quotidien (vous vous sentez lésé, coupable, vous avez du ressentiment, etc.)
Il se peut vous vous sentiez coupable par rapport à une situation passée.
Vous voudriez peut-être changer quelque chose que vous avez dit ou fait.
Vous voulez obtenir justice car vous vous sentez lésé(e).
Si l’objet de votre rumination concerne un sujet de votre quotidien, si vous n’avez aucun contrôle sur celui-ci (ex.: vous ne pouvez pas changer le passé), la meilleure solution est de lâcher prise.
Mais cela ne s’improvise pas et accepter ce qu’on ne peut pas changer est souvent ardu mais très utile pour traiter ce type de rumination.
Il existe des stratégies particulières et des méthodes efficaces pour y parvenir, ce que j’explique dans mon livre sur le lâcher prise.
Si votre rumination est liée à la dépression
La dépression est un trouble de l’humeur qui doit être pris au sérieux.
Le traitement de ce type de rumination mentale que l’on nomme «distorsions cognitives» dans la dépression est la psychothérapie cognitivo-comportementale et, éventuellement, la prise d’antidépresseurs.
Cette psychothérapie permet de réaliser le recadrage cognitif pour contrer la rumination que suscitent ces distorsions.
Si vous souffrez de dépression ou pensez en souffrir, je vous suggère de consulter un(e) psychologue.
Voici aussi mon article qui présente les symptômes et les signes de la dépression.
En plus de consulter, il est possible d’apprendre à appliquer le recadrage par soi-même.
C’est ce que ma formation pour combattre la déprime pourra aussi vous aider à réaliser en plus de répondre à plusieurs questions que vous pourriez avoir sur ce sujet.
Formation antidéprime
Module Web vidéo pour se libérer de la déprime.
Si votre rumination provient du trouble obsessionnel-compulsif
Si vous souffrez du TOC ou pensez en souffrir, voici des stratégies qui sauront vous aider à traiter la rumination mentale qui y est reliée à travers les obsessions.
Ces outils ont fait leurs preuves sur le plan scientifique et sont utilisés avec succès à travers le monde.
Le traitement le plus efficace contre les obsessions et les compulsions qui font ruminer à travers le TOC se nomme l’exposition avec prévention de la réponse.
Ce traitement permet de réduire progressivement les peurs des obsessions et de recourir de moins en moins souvent aux compulsions pour réduire l’anxiété.
Le résultat est que les pensées, les doutes, les peurs et les inquiétudes reviennent de moins en moins souvent à l’esprit et l’anxiété diminue.
La meilleure ressource dont je dispose pour vous aider à traiter ce type de rumination sont mon programme Web vidéo autodirigé «Libérez-vous du TOC et des obsessions»:
Libérez-vous du TOC et des obsessions
Programme Web vidéo complet sur le traitement du TOC et accompagné de mon ebook sur les pensées intrusives en introduction.
Module complémentaire sur la phobie d'impulsion
Module Web vidéo sur le traitement de la phobie d'impulsion et complémentaire à mon programme principal.
Module complémentaire sur le «TOC homo»
Module Web vidéo sur le traitement du TOC de la peur d'être homosexuel.
De la crise de panique à la tranquillité
Ebook de stratégies d'intervention rapide pour une guérison durable.
Ai-je un TOC? (ebook)
Ebook pour vous aider à savoir si vous souffrez bien de TOC.
Toutes mes ressources vous expliquent comment adapter et appliquer de manière autodirigée (self-help) le traitement d’exposition avec prévention de la réponse à votre situation et à vos besoins.
Mais il est aussi recommandé de consulter et, si vous désirez le faire, choisissez un(e) psychologue d'orientation cognitivo-comportementale qui est spécialisé(e) dans le traitement du TOC.
Ce sont les meilleurs spécialistes pour vous aider avec ce type de problème et, avant de débuter les séances, assurez-vous qu’il/elle peut réaliser le traitement d’exposition avec prévention de la réponse avec vous, car il est le plus efficace pour arrêter les TOCS.
Voici une page qui vous aidera à trouver un(e) psychologue.
J’espère de tout cœur que cet article et les nombreuses ressources en ligne sur le TOC de mon site vous aideront comme elles ont déjà aidé un grand nombre de personnes aux prises avec ce problème.
Si vous désirez partager vos expériences personnelles ou si vous avez des questions, les commentaires ci-dessous sont là pour vous!
Références
- André, Christophe, Les États d'âme: Un apprentissage de la sérénité, 2011, Odile Jacob, 480 p.
- Delfosse, Céline et al. «Les motifs allégués du partage social et de la rumination mentale des émotions: comparaison des épisodes positifs et négatifs», dans Les Cahiers Internationaux de Psychologie Sociale, 2004, vol. 64, no 4, p. 35-44.
- Purdon, Christine, «Psychological Treatment of Rumination», dans Costas Papageorgiou et Adrian Wells (éd.), Depressive Rumination: Nature, Theory and Treatment, Wiley, 2003, p. 217-239.
- Smith, Jeannette M. et Lauren B. Alloy, «A roadmap to rumination: A review of the definition, assessment, and conceptualization of this multifaceted construct», dans Clinical Psychology Review, vol. 29, no 2, 2009, p.116-128.
- Watkins, Edward, R., «Psychological treatment of depressive rumination», dans Current Opinion in Psychology, 2015, vol. 4, p. 32-36.
- Watkins, Edward. R. et Henrietta Roberts, «Reflecting on Rumination: Consequences, causes, mechanisms and treatment of rumination», dans Behavior Research and Therapy, 2020, vol. 127.
Joce dit
Quel traitement contre les ruminations quand on culpabilise d’avoir mal agit?
Nicolas Sarrasin dit
Dans ce genre de contexte, il est certain qu’un perspective constructive pour aller mieux consiste à apprendre à lâcher prise. J’ai d’ailleurs écrit un livre entier sur le lâcher prise, pour aider en ce sens. Et voici sa page de présentation.
Je vous souhaite le meilleur.
Christophe D. dit
Bonjour,
Comment se nomment les ruminations à thème de perfectionnisme?
Avec mes remerciements et salutations.
Nicolas Sarrasin dit
Les ruminations perfectionnistes font partie des thèmes courants des obsessions dans le trouble obsessionnel-compulsif, comme je l’explique dans mon article détaillé qui présente ces thèmes des obsessions du TOC.
Nicolas dit
Bonjour,
Je fais des blocages sur des mots et des objets, c’est-à-dire que je lis une phrase et je vais bloquer sur un mot et le ressasser pour vérifier s’il revient à ma mémoire et, forcément, il revient. C’est devenu envahissant. Il est de même pour les objets. À un moment donné, je vais voir un objet et je fais le même rituel de vérification.
Pouvez-vous m’aider à savoir pourquoi je fais cela?
Nicolas Sarrasin dit
Bonjour,
Si vous souffrez de TOC, ce dernier provient d’une hypersensibilité du cerveau qui porte à répéter des compulsions pour le “rassurer”. Je vous invite à lire mon article qui explique les causes du TOC.
Vous devez traiter votre TOC avec la TCC d’exposition avec prévention de la réponse. J’explique comment arrêter le TOC dans mon programme Web vidéo.
Je vous souhaite le meilleur.
Rayan dit
Bonjour,
J’ai un mot à connotation très angoissante et négative qui me revient toute la journée en tête depuis quelques temps. J’ai réussi à calmer l’angoisse liée au mot en lui même mais le mot reste dans ma tête tout le temps, et c’est la fréquence de son apparition qui m’embête et m’angoisse.
Je ne sais pas exactement si c’est un TOC ou pas…
Auriez-vous des pistes ?
Nicolas Sarrasin dit
Ce que vous décrivez pourrait être un TOC, le mot étant l’obsession, mais il faudrait savoir comment vous y réagissez pour savoir si vous réalisez des compulsions. C’est probablement le cas, car le mot ne reviendrait pas si vous ne le combattiez pas dans votre esprit d’une quelconque manière (compulsion).
Alors les pistes sont les mêmes pour tout le monde: commencer par consulter pour obtenir un diagnostic, ce qui permet aussi d’obtenir un plan de traitement.
Si vous souffrez de TOC, réaliser la TCC d’exposition avec prévention de la réponse, qui est scientifiquement reconnue comme la plus efficace.
Mes ressources comme mon programme web vidéo peuvent beaucoup vous aider en ce sens.
Je vous souhaite le meilleur.